• Atelier du ouiken 13...

    13


    silence 
    oscillations de gauche à droite
    une oreille s'écrase l'autre oreille se désencoquille sous la voix crachouillarde de la radio
    c'est l'heure des catastrophes 
    entre le brouhaha étouffé des plumes d'oiseaux et les cacquetages qui sont légions sur le créneau des informations
    oscillations de gauche à droite enfouies entre le refus moite et la couette trop lourde
    de la position couchée à celle où les pieds seraient sur terre il y a hésitation à se mettre debout
    silence
    quelque part les amputations vont bon train
    passé un certain seuil la douleur ne s'exprime plus
    ici ou là les pelletées de ciment de chaux de terre ajoutent une couche à l'oubli
    les petits trafics ont la vie belle
    part de misère contre part d'exploitation
    des bouches décortiquent le mode d'emploi de la fabrication des galettes de sable
    on n'arrête plus le progrès côté technique
    pendant ce temps les mers meurent
    mer morte
    silence
    les oiseaux démantèlent les boiseries font des trous dans les haies guettent bruyamment l'apparition des vers tapissent le sol de fientes noires du jus des cerises
    dans les forêts le geste du tireur à l'arc n'en finit pas de rater sa cible
    les chasseurs à ce qu'on dit passent leur temps à cueillir des champignons en claquant du fusil juste pour en vérifier l'état de marche et devisent paisiblement sur les meilleures recettes du terroir
    les vergers sont tranquillement entourés de clotures électriques pour éloigner le gros gibier qui ne sait pas que nous sommes au vingt et unième siècle
    les chevaux tous plus beaux les uns que les autres sont nourris grassement de champs en friches
    le technicien de grandes surfaces affublé d'un nom de paysan met du fuel dans son tracteur pour transporter des tuyaux d'irrigation quand il ne fait pas le tour de ses parcelles en fourgonnette blanche
    on moissonne la nuit tous phares allumés avec des écouteurs bien ajustés diffusant la world musique 
    les lampadaires font croire aux merles qu'il fait jour
    silence
    au fin fond d'une steppe un homme a survécu en se nourrissant de racines de baies de coquillages de poissons pêchés à mains nues de sauterelles de volatiles à tordre le cou de bêtes à poil dépecées à coups de pierre et sèchées au soleil
    il a bu ce qu'il a pu puis son coeur a cessé de battre et le monde s'en étonne
    au fin fond d'une steppe un homme cherche des racines des baies des coquillages des poissons à pêcher à mains nues des sauterelles des volatiles à tordre le cou des bêtes à poil à dépecer à coups de pierre et à sècher au soleil
    il a soif de rosée
    mais son coeur risque de cesser de battre et le monde discute le coup
    ailleurs des trombes d'eau s'abattent
    forcément au fin fond d'un pays un homme est trempé comme une soupe et patauge dans des marécages chaque pas l'englue un peu plus
    quelqu'un demande comment son coeur n'a pas encore cessé de battre et le monde fait des pronostics
    la météo signale que l'état du ciel n'arrangera rien à nos affaires
    silence
    l'eau a cessé de distiller ses jolis gargouillis
    elle est devenue inaudible dans ses dédales de pipeline ses circuits d'usine aérodynamique ses mises en bouteilles et en boîtes  ses transports en citernes sur autoroute du soleil ses voyages en soutes ses distributions en pastilles ses goutte à goutte humanitaires ses bassins de décantation de pleine nature ses filtres au charbon de bois ses osmoseurs domestiques du dernier cri ses ventes aux enchères montées en flèche ses partages aux plus offrants ses conciliabules de stratégie alimentaire ses répartitions nord sud ses effets contraires est ouest ses armadas de querelles intestines ses coupures au robinet devenus monnaie courante ses secrets de serres en plein coeur du désert ses communications internationales diffusées à grande vitesse ses prospectives de pique sou bédéifiés ses histoires de saints et de saintes des fontaines ses ablutions télévisées de marchands du temple

    silence radio

    radio silence

     

    (allo allo

    juste un filet de voix
    et le flux sinueux d'une rivière de mots

    un vol de libellules effleurant  le cours d'eau)

    (à suivre...)
     

     
    andrée wizem

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