le la des poètes
les poètes font cercle le piano est muet
on entend le ressac de l'écume des jours
la barrière du silence s'étire sur les notes
les poètes font cercle ils sondent les bas-fonds
que disent tous ces mots immensité de mers
avec un goût de miel ou bien d'eau saumonée
en parfum de menthol ou des relents d'épices
en liqueurs sucrées ou crus de tord-boyaux
tissant de la dentelle ou martelant l'acier
sous des tours d'alambiques ou des phrasés retords
avec le dictionnaire ou l'imagier du corps
sourires de princesse bouches édentées des gueux
que disent tous ces mots immensité de mers
c'est une envie de dire moi je veux que l'on m'aime
et mon ego rugit ces mots existentiels
aimez moi aimez moi aimez moi
et mon émoi est là couvant sous ma pelouse
faut-il que l'on saigne pour érafler les murs
faut-il que l'on s'écroule pour dresser des murailles
faut-il que l'on taise pour hurler des souillures
faut-il que l'on pleure pour plonger dans la glaise
faut-il que l'on crève pour piétiner nos rêves
faut-il que l'on meurt pour se cabrer encore
faut-il qu'on soit seul pour que l'on s'agglutine
alter ego et moi faut-il que l'on s'aime
qu'on se choque qu'on se flaire
que les torses s'affrontent
qu'on s'appuie sur les autres qu'on les mette à genoux
qu'on s'agrippe à la nuque près de serrer le cou
qu'on s'empoigne masqués en mordant la poussière
qu'on ferme les paupières de ceux qui nous regardent
qu'on se tatoue des bleus
pour mieux marquer la place
qu'on morde jusqu'au sang
pour voir les meurtrissures
et mon ego vomit ces mots existentiels
aimez moi aimez moi aimez moi
me voilà mise à nu par cette sarabande
les fils sont coupés autour c'est le désert
je cherche mon ego au milieu des viscères
et quel sang coule en moi me bleuissant la peau
regardez mon alter émergeant de sa glaise
qui se hisse lentement extirpant quelques vers
allez hop
fini les larmoiements la réflexion des ombres
fini l'incantation de l'éternel retour
et la reproduction tout comme à l'identique
je suis dans ton espace vois comme je te regarde
j'ai en moi quelques fluides
c'est un mystère sans nom
moi je peux t'emporter je veux bien prendre tout
si le socle est métal
je créerai le vertige engendrant la fusion
ton corps s'assouplira je peux le délester
je veux bien prendre tout et si tu es d'argile
je pourrai me baisser cueillir les poussières
quelques uns de mes fluides
tu les connais déjà
mais j'en ai d'autres encore je peux tout repétrir
je peux te transformer en douce barbotine
remodeler les formes en les arrondissant
qui sait si la roulade ne sera pas possible
je pourrai prendre tout le socle et puis ton ombre
même le puits sans fond déjà nous sommes deux
ne vois-tu pas venir comme un grand tourbillon
les lignes se font courbes et font des enjambées
n'entends-tu pas déjà les notes d'un tango
les plexus solaires commencent à trouver l'amble
vois reconnais les accents
tu avais oublié ce qui est en dessous
oui c'est impersceptible
mais entends le tambour qui rythme cette danse
c'est ce mouvement là qui fait l'emballement
vois déjà le mystère que tout cela engendre
n'ayons pas peur des mots qu'est ce que tu dis de ça
cette pluie de mots patiemment roulés sous la langue
arrondis à la voûte du palais ciselés à tes dents acérées
mouillés au sel de ta salive
cette pluie de mots des bulles qui s'étirent
des fluides lumineux des vrilles aiguisées
des accents violoncelle cette pluie de mots
des espaces pleins
des espaces pleins
des espaces pleins
les poètes font cercle le piano est muet
on entend le ressac de l'écume des jours
la barrière du silence s'étire sur les notes
les poètes font cercle ils sondent les bas-fonds
trois mots font une histoire que faire de ces trois-là
un triangle sans doute et le la des poètes peut enfin résonner
andrée wizem
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premier texte dit sur une scène slam à crest (espace limonade)
lors du salon de la petite édition (espace liberté)
le 02.05.2006