• Poème marouflé sur bois 26...

    noctambules

    lui

     

    le mur garde toujours la trace
    de la photographie où ruisselait
    la chevelure d'une vaste prairie
     
    elle

     

    la nappe de safran
    trempe dans le ruisseau sans fin
    dos courbé d'une femme

     

    lui

     

    c'était un temps béni
    les jupes étaient barbouillées de framboises
    je m'amusais à compter les grains

    nous en sommes à un pouillème
    des récoltes à venir

     

    elle
     
    saisir chaque instant
    comme on picore aux fruits mûrs
    un jus de myrtille
    s

    lui

    il y avait un privilège
    dans le fait de pouvoir imbiber d'encre
    le plateau rectangulaire
    couvert de velours ras et luisant

    l'empreinte nouvelle
    est aussi vive qu'une signature
    quand les lettres au tampon
    ont plongé dans cette marée

    elle

    les formes sont obscures
    drapées de bleu indigo
    le poème s'y cache

     
    lui

    je furète encore entre les arbres
    des oiseaux je ne trouve que les plumes
    leur chant échappe toujours à mon entendement

    pourtant je devine la becquée dans les futaies

    elle

    un soupçon de rouge
    a chuté sur le tapis
    comme un bibelot

     lui

    je regardais les crustacés
    jetés dans l'eau brûlante

    le gros bouillon écarlate
    ne manquait pas d'épices

    je garde au fond de l'oreille
    le craquement des carapaces

    elle

    parfum de raisins
    offrant la promesse d'un vin
    dans un fût de chêne

    lui

    les peintures à la chaux
    avaient la vivacité du ciel

    je collais mon visage à l'embrasure
    pour ne rien manquer du spectacle

    le feu d'artifice
    était à la hauteur

    elle

    la fleur oubliée
    bleuet au champ égaré
    le solstice d'été


    lui

    derrière la porte
    s'amoncellaient
    des éclats de voix

    dans un rebond
    je m'accrochai
    au fil le plus clair

    comme funambule
    avec  une ombrelle
    sur un arc en ciel

    allant pas à pas
    je parviens enfin
    sur le tremplin

    elle

    le temps élastique
    comme les caprices des saisons
    invente ses images

    lui

    si l'arbre vient à mourir
    si la feuille vient à manquer
    si les lettres disparaissent

    les gestes perdus
    composent la mémoire
    des mots absents

    elle

    une hésitation
    au mi temps de l'écriture
    comme un crissement

    lui

    un couloir infini
    venu de l'enfance

    mon arrivée tardive
    résonne au vestibule

    j'ai dans ma poche
    des jeux inachevés

    elle

    un jardin en friches
    de la terre au paradis
    chemins de traverse

    lui

    l'espace agrandi de musique
    les corps penchés sur la nuit

    fantaisies démonstratives
    dans une langue troubadour

    dans mes bras est une flamme
    que j'attise par mon souffle
    elle

    chaleur aux épaules
    la trame des tissus brodés
    suit une rivière

    lui

    les catégories du calendrier
    ne sont pas pour les poètes

    il neige au coeur de l'été

    dans un nouvel esperanto
    il faut baptiser les jours

    elle

    le printemps vacille
    quand est remise à plus tard
    la douceur de vivre

    lui

    quelque part dans le monde
    mes draps de lit sont pliés

    ma houppelande est vaste
    je peux rêver en marchant
     
    sous une pluie d'étoiles
    je découvre une maison


    elle

    les murmures feutrés
    sont au creux des lits défaits
    comme froissement d'ailes

    lui

    la nuit ne peut s'éveiller
    dans le coeur des mots
    dits comme en plein jour

     elle

    avant de dormir
    la nouvelle toile entrevue
    couleurs inconnues

     

     

    andrée wizem

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